Alcool au Volant – Garde et contrôle
Le juge Gilles Gaumond de la Cour municipale de la Ville de Québec a rendu, le 28 octobre 2013, un verdict d’acquittement dans une cause de garde et contrôle d’un véhicule moteur alors que l’accusé avait les facultés affaiblies ainsi qu’une accusation de garde et contrôle d’un véhicule moteur alors que son alcoolémie était de plus de 80 mg/100 ml de sang.
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Les faits dans cette cause
Vers 1h 30, les policiers sont appelés afin de se rendre à un bar de Québec car 2 individus causent du désordre.
L’accusé et son ami, les deux individus en question, sont expulsés du bar. Les policiers discutent avec ces derniers et signifient, à chacun, un constat d’infraction pour avoir causé du désordre.
Les deux individus quittent alors en se dirigeant vers le chemin Sainte-Foy. Un superviseur des policiers qui est sur les lieux entend l’accusé déclarer: « Je vais prendre mon char pour aller chez moi. » Le superviseur leur conseille alors de ne pas prendre le véhicule vu leur état d’ébriété. L’ami de l’accusé indique au superviseur de ne pas s’inquiéter et qu’ils rentreraient à pied. Les deux individus continuent leur chemin à pied.
Deux heures plus tard, un appel anonyme incite les policiers à revenir sur place. Ils y trouvent l’accusé en état d’ébriété très avancé, installé au volant d’un véhicule. La portière côté conducteur est ouverte et son ami est passager. Il est ici important de noter que lorsque les policiers arrivent sur place, le moteur du véhicule n’est pas en marche et les phares ne sont pas allumés.
Les policiers constatent les symptômes suivants : haleine d’alcool, yeux vitreux, difficulté à parler, difficulté à garder son équilibre et difficultés à trouver son permis de conduire.
L’accusé n’a pas la clé du véhicule et il ne sait pas où elle se trouve. Un des policiers trouve celle-ci, quelques minutes plus tard, sous le tapis du côté passager.
Les policiers mettent l’accusé en état d’arrestation pour garde et contrôle d’un véhicule alors que ses facultés sont affaiblies par l’alcool.
L’accusé a de la difficulté à comprendre ce qui se passe et indique aux policiers, à quelques reprises, qu’il ne conduisait pas son véhicule et qu’il s’était rendu à celui-ci seulement pour appeler un taxi.
Une fois au poste, l’accusé fournit les échantillons d’haleine requis et ces tests révèlent une alcoolémie de 212 milligrammes et 213 mg/100 ml de sang.
La version de l’accusé
Le soir des événements, les deux amis quittent leur résidence pour se rendre dans un bar dans les environs.
Ils y consomment de la bière et des shooters. S’apercevant qu’il commence à être en état d’ébriété, l’accusé remet les clés de son véhicule à son ami car il ne veut pas conduire son automobile dans cet état.
Son ami se dispute avec la barmaid du bar et c’est suite à cette dispute que les deux amis sont expulsés des lieux.
Lorsque les policiers lui remettent le constat pour désordre, le défendeur indique aux policiers qu’il est injuste qu’il reçoive un constat car il n’a pas participé à la dispute de son ami avec la barmaid.
Les deux amis quittent les lieux et vont dans un bar voisin. Ils y consomment quelques bières et des shooters jusqu’à la fermeture du bar. À leur sortie du bar, ils décident d’aller au restaurant. Comme ils désirent se rendre au restaurant en taxi, ils se rendent au véhicule de l’accusé afin d’y prendre son cellulaire et son carnet d’adresse. Le numéro de téléphone de la compagnie de taxi y est inscrit. C’est pendant qu’il cherche celui-ci que les policiers arrivent.
Selon l’accusé, la seule raison pour laquelle il s’est rendu à son véhicule était pour récupérer son téléphone et son carnet d’adresse. Jamais il n’a eu l’intention de conduire son véhicule.
Motifs et décision
Le juge indique dans son jugement : « La Cour suprême dans l’affaire R. c. Boudreault, [2012] 3 R.C.S. 157, établit quels sont les éléments essentiels de l’infraction de garde ou de contrôle.
« [33] Dans cette optique, j’estime utile d’énoncer à nouveau les éléments essen-tiels de l’infraction de « garde ou [de] contrôle » décrite au par. 253(1) du Code criminel :
1) une conduite intentionnelle à l’égard d’un véhicule à moteur;
2) par une personne dont la capacité de conduire est affaiblie ou dont l’alcoolémie dépasse la limite légale;
3) dans des circonstances entraînant un risque réaliste de danger pour autrui ou pour un bien.
[34] Il faut que le risque de danger soit réaliste, non pas seulement possible en théorie : Smits, par. 60. Il n’a toutefois pas non plus à être probable, ni même sérieux ou considérable.
[35] Exiger qu’il existe un risque « réaliste » constitue un critère peu rigoureux conforme à l’intention du législateur de prévenir le danger pour la sécurité publique. Par contre, exiger un risque qui ne serait que « possible en théorie », un critère trop peu rigoureux, emporterait la criminalisation injustifiée d’une foule de comportements bénins. » »
Il est ici important de préciser que l’article 258(1)a) du Code Criminel stipule qu’une présomption existe lorsqu’une personne occupe le siège du conducteur et, pour renverser cette présomption, le défendeur doit prouver à la Cour « qu’il n’occupait pas cette place ou position dans le but de mettre en marche ce véhicule.»
Selon le juge, la présomption a été repoussée dans le présent dossier.
« Le défendeur présente une preuve que les risques intrinsèques au fait qu’il était en état d’ébriété er qu’il puisse mettre le véhicule en marche n’est pas réaliste dans les circonstances de la présente affaire. ».
Le défendeur a remis les clés de son véhicule en début de soirée justement pour lui éviter de conduire son automobile en état d’ébriété.
L’ami du défendeur a utilisé les clés pour ouvrir les portières du véhicule et en aucun cas il ne les a remises au défendeur. Les clés ont été retrouvées par terre du côté passager, ce qui confirme les dires de ce dernier.
Lorsque les policiers arrivent sur place le moteur du véhicule n’était pas en marche.
« Dans Boudreault, précité, la Cour suprême établit certains critères d’application d’un risque réaliste :
« [48] Il va sans dire que l’existence d’un « risque réaliste » est un critère peu rigou-reux et, en l’absence de preuve à l’effet contraire, constitue normalement la seule inférence raisonnable lorsque le ministère public fait la preuve de l’intoxication et de la capacité, dans les faits, de mettre le véhicule en mouvement. Pour éviter d’être déclaré coupable, l’accusé devra faire face, sur le plan tactique, à la nécessité de présenter des éléments de preuve crédibles et fiables tendant à prouver qu’il n’y avait pas de risque réaliste de danger dans les circonstances particulières de la cause.
[49] L’accusé peut échapper à une déclaration de culpabilité, par exemple, en présentant des éléments de preuve selon lesquels le véhicule à moteur était hors d’état de rouler, ou positionné de telle sorte qu’il n’y avait pas de circonstances raisonnablement concevables dans lesquelles il aurait pu présenter un risque de danger. De même, l’utilisation d’un véhicule à une fin manifestement innocente ne saurait emporter la stigmatisation d’une condamnation criminelle. Comme l’a fait remarquer le juge en chef Lamer dans l’arrêt Penno, [1990] 2 R.C.S. 865, « la loi ne manque pas totalement de souplesse et ne va pas jusqu’à punir la simple présence dans un véhicule à moteur d’une personne dont la capacité de conduire est affaiblie » (p. 877). » »
Le juge, considérant l’accusé n’a posé aucun geste de garde ou de contrôle de son véhicule, acquitte ce dernier des accusations portées.
Référence : R. c Cyr (2013) QCCM 244
Me Micheline Paradis, Avocate
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